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Douance / haut potentiel intellectuel

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Haut potentiel intellectuel, douance, précocité, surdon… Ces termes sont en vogue depuis une dizaine d’années. Des sites, associations, définitions, livres… fleurissent tant et tant que l’on s’y perd un peu.

Définir le haut potentiel intellectuel semble dès lors devenir une gageure.

 

Pour ma part, j’utilise essentiellement les termes de « douance » et « haut potentiel » (dans son acception ici de : « haut potentiel intellectuel »).

Tous ces termes que vous avez croisés ou rencontrerez sur votre chemin : haut potentiel intellectuel, haut quotient intellectuel, douance, surdouance, précocité, zèbre, surrefficience mentale… tendent cependant à rejoindre une même entité clinique, aux contours un peu flous.

Mais le choix de l’un plutôt que de l’autre n’est pas non plus anodin et renseigne sur le positionnement de votre interlocuteur ou, du moins, sur un aspect plus particulier de ce phénomène (1).

Tentative de définition du haut potentiel intellectue
Un critère statistique
Caractéristique cliniques
Au plan neurologique
Tentative de définition du haut potentiel intellectuel

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« Le haut potentiel consiste à présenter une ou plusieurs zones de capacités intellectuelles qui s'écarte(nt) significativement du niveau moyen des capacités des personnes de la même tranche d'âge. Parler de haut potentiel n'a de sens que si ces capacités sont contextualisées et mises en lien avec les autres sphères de fonctionnement de la personne. » (2)

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Un critère statistique

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La question de la définition de la douance fait intervenir une dimension statistique, dont le seuil fluctue selon la culture du pays concerné, mais aussi selon les partis pris de chaque psychologue.

 

Ainsi :

  • En France, est surdoué toute personne dont le QI est ≥ 130 (ce qui correspond à + 2 écarts-types sur la courbe de Gauss, à la moyenne de 100 et l’écart-type de 15 sur l’échelle de Wechsler). Cela correspond à 2,27 % de la population.
    En Belgique, par exemple on retient souvent un seuil de 125, ce qui correspond à 5 % de la population.
    À l’association Mensa (association de surdoués), le seuil admis est 132, ce qui correspond à 2 % de la population.

  • Certains psys souhaitent absolument qu’un tel QI soit « homogène », soit : que la disparité des différentes composantes sur lesquelles le QI est calculé ne soit pas trop importante. (Autrement le QI est dit « non significatif ».)
    D’autres psys, même face à des résultats hétérogènes et un QI non significatif, statuent selon la valeur de certaines composantes du QI (ICV et / ou IRP ≥ 130, par exemple).

  • Afin de mieux tenir compte de la diversité et complexité des profils des personnes qui consultent et pour sortir un peu de cette dimension réductrice du QI comme synthèse pas toujours représentative de la mise en jeu des fonctions cognitives, dans leur ouvrage, S. Brasseur et C. Cuche évoquent la notion de « zone de haute potentialité » (3).

 
Les « caractéristiques cliniques »

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Associées à cette définition basée sur un critère statistique suite à une passation d’un test psychométrique (ssentiellement la WAIS-IV), fleurissent quantités de listes de signes cliniques qui seraient associés aux personnes à haut potentiel : hypersensibilité, hyperesthésie, pensée « divergente » (ladite « pensée en arborescence »), agilité intellectuelle, grand sens moral, introversion, sens de l’humour, plus grande tendance à l’anxiété, sentiment de différence / décalage / incompréhension…

Mais ces signes cliniques sont présents également en population générale. Ce ne sont pas des signes du haut potentiel intellectuel. Ils peuvent en revanche être les indicateurs possibles d'un trouble associé (dépression, anxiété, TDAH, syndrome d'Asperger…), auquel il convient de prêter également attention.

 

On peut donc présenter bon nombre de ces signes et ne pas être surdoué comme être surdoué et… ne pas se sentir présenter ces signes-là.

 

« À ce jour, les seules caractéristiques qui peuvent être mises en évidence de manière fiable découlent directement des hautes capacités intellectuelles, telle la rapidité d’apprentissage. Certaines spécificités se manifestent parce qu’elles sont influencées en partie par ces hautes capacités, mais, dans la plupart des cas, les caractéristiques individuelles souvent attribuées au haut potentiel ne devraient pas l’être. » (4)

 

Ainsi, tout sujet à haut potentiel n’est pas nécessairement hypersensible, n’est pas plus à risque d’être anxieux qu’une personne qui n’est pas surdouée, peut tout à fait mener un parcours scolaire et professionnel satisfaisant…

La créativité serait corrélée positivement avec l'intelligence (du fait de la pensée divergente) jusqu'à 120 mais plus au-delà. On peut donc être surdoué·e sans être particulièrement créatif et vice-versa.

Par ailleurs, quant aux affects, il semble que si les personnes surdouées sont plus à même d’identifier leurs émotions et celles présentes chez les autres, elles pourraient connaître plus de difficulté dans leur gestion. La littérature sur la question est cependant fort contradictoire. (5)

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Néanmoins, la recherche de ces « signes cliniques » peut être intéressante, au même titre que la relecture de votre parcours, pour mieux entendre votre trajectoire, évaluer ce qu'il peut en être d'une possible hypothèse de haut potentiel intellectuel, formuler d'autres hypothèses adjacentes ou concurrentes et, au-delà, mieux entendre de manière plus globalement ce qu'il en est de votre fonctionnement cognitif, affectif, psychique, dépister d'autres troubles qui vous font souffrir…

Le haut potentiel peut engendrer, quand c’est le cas, des difficultés plus spécifiques dont il importe de tenir compte : sentiment de décalage par rapport au pair, ennui possible à l'école (attention à un autre trouble… ou juste à une intolérance à l'ennui), pression de la réussite, manque d'estime de soi (pas tant lié au HPI lui-même qu'à la confrontation entre les performances réalisées ou attendues, les attentes familiales, le contexte social, scolaire, etc.) Il peut être intéressant de prendre connaissance du haut potentiel intellectuel. (Mais pour certains enfants « dépisté·es » comme HQI, cela a pu aussi être un poids.)

 

Ainsi, « sur base des recherches actuelles, on peut affirmer qu’une personne à haut potentiel se caractérise par son fonctionnement intellectuel particulier, qui se traduit généralement dans le domaine des apprentissages. » (6).

Les diverses caractéristiques cliniques seraient donc directement le fruit des particularités cérébrales des sujets surdoués :

  • Le fonctionnement du cerveau d’une personne à haut potentiel est donc à la fois plus rapide et plus efficace. De là une potentielle plus grande rapidité et efficacité d’apprentissage chez les sujets surdoués par rapport à la population générale. L’appétence des personnes surdouées envers les sujets complexes, difficiles à appréhender, est souvent plus grande, afin de sentir une mise à l’épreuve de leurs facultés cognitives. (Le versant négatif en est souvent la difficile confrontation avec la nécessité de se mettre à travailler, souvent à un âge tardif, voire très tardif, ce qui n’est pas sans engendrer des difficultés, une perte d’estime de soi, etc.)

  • Le cerveau est mature plus tôt, entraînant une avance souvent observée (mais pas toujours !) dans divers domaines : sur le plan du langage, de l’acquisition de la lecture, de l’écriture, du nombre… (Il n’est donc pas rare qu’un enfant surdoué sache lire avant l’entrée en CP ou qu’il apprenne très rapidement à lire et écrire, mais ce n’est pas spécifique non plus. Et les enfants en avance sur les apprentissages ne sont pas non plus nécessairement surdoué·es.) Ce qui apparaît comme une avance chez les enfants perdurent dans les temps : les compétences intellectuelles des sujets surdoués restent significativement plus importantes par rapport à celle de la population générale.

  • Les particularités cérébrales d’un sujet surdoué, quand elles sont mesurées à l’aide d’un outil psychométrique, se distinguent singulièrement de la norme dans un ou plusieurs domaines de l’intelligence  (7) : domaine verbal, domaine visuo-spatial, domaine du raisonnement fluide, mémoire de travail, vitesse de traitement pour ce qu’il en est des échelles de Wechsler. Binet aurait ainsi déclaré : « L’intelligence, c’est ce que mesure mon test. »

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Sur le plan neurologique

 

Sur le plan neurologique, les enfants surdoués présenteraient comme une plus grande automatisation (région pariétale du cerveau) des tâches considérées par eux comme simples, et n’ont ainsi pas besoin d’utiliser autant de ressources en attention et en concentration (lobe frontal) que leurs pairs pour le même travail ; en revanche, si la tâche devient plus complexe, il semblerait qu’ils soient capables de déployer une force de travail intellectuel supérieure à la moyenne (8).

« Le réseau fronto-pariétal s’avère essentiel dans plusieurs activités liées à l’intelligence abstraite. » (9) Ce réseau fronto-pariétal serait à la source de la pensée divergente (parfois appelée « pensée en arborescence »), impliquée dans la résolution de problèmes et les processus créatifs. Cette pensée divergente serait davantage présente chez les personnes à haut potentiel.

De surcroît, il semble que les connexions synaptiques soient à la fois plus nombreuses et plus actives (10) : « La qualité de l’échange d’informations entre les deux parties du cerveau est donc un élément possible parmi les sources de la précocité intellectuelle. » (11)

La gaine de myéline qui permet la transmission de l’influx neuronal serait également plus épaisse chez les sujets surdoués.

Enfin, l’organisation cérébrale du sujet surdoué serait pour une part en avance par rapport à celle de ses pairs. (12)

 

De là à dire que les différences cérébrales entre les sujets surdoués et ceux qui ne le sont pas seraient importantes, voire radicales, il n’y a qu’un pas… à ne pas franchir. En effet : « Plus efficace, plus puissant et se développant plus vite, oui. Le plan d’organisation global reste pourtant le même, et les différences sont plus quantitatives que qualitatives… et restent ténues. » (13)

Ce serait oublier aussi qu’entre les gens « normaux » et les gens « surdoués », il n’y a pas de rupture, mais un continuum.

 

De surcroît, biologie et psychisme ne sont pas séparés par une frontière étanche mais ils s’imprègnent, s’interpénètrent sans cesse. Il n’y a rien de psychique qui n’ait de substrat biologique (sans correspondance stricte, comme on aimerait parfois bien, par souci utopique de simplicité), et inversement.

 

L’expression d’un haut potentiel ne dépend pas que de la biologie, mais aussi de la psyché d’un individu donné, de sa motivation, de son environnement…

Certains sujets ne donneront aucunement l’apparence d’être surdoués et c’est bien plus tard, à l’âge adulte, au gré d’un parcours plus ou moins rectiligne ou chaotique, se sentant parfois obscurément « différents », qu’ils le découvriront.

Ce n’est pas parce que l’on n’a pas été repéré·e enfant, que l’on n’a pas su lire à deux ans, ni même à cinq, que l’on n’a pas eu de parcours extraordinaire ou que l’on n’a pas été en échec scolaire, que l’on n’est pas surdoué·e.

Identifier le HPI
Comment identifier le haut potentiel intellectuel ?

 

Je me contenterai de reprendre les propos de S. Brasseur et C. Cuche :

 

« Le QI est une information clef, indispensable pour pouvoir identifier le haut potentiel intellectuel. Cependant, à lui seuil, il ne permet pas de répondre adéquatement aux besoins non rencontrés de la personne qui motivent généralement la démarche d’identification. Il est donc nécessaire d’associer le QI à d’autres éléments d’évaluation pour comprendre le fonctionnement global de l’individu et les besoins qui en découlent. » (14)

 

C’est pour cela que, pour ma part, je vous proposerai toujours un premier entretien afin de mieux entendre votre parcours et votre histoire, ainsi que vos motivations.

C’est aussi pour cela que je propose en outre des tests de personnalité afin de mieux évaluer ce qu’il en est de la sphère affective et de son intrication avec la sphère intellectuelle.

Se savoir HPI
À quoi cela sert de se savoir à haut potentiel ?

 

Eh bien… cela dépend… de vous.

Cela peut permettre de mieux entendre et comprendre un parcours de vie jugé jusque-là difficile, insatisfaisant, de mieux prendre conscience de ses forces comme de ses faiblesses, que ce soit sur le plan cognitif comme affectif.

 

Même si statistiquement, être à haut potentiel intellectuel n'est pas susceptible de vous rendre plus dépressif·ve, plus angoissé·e, ou autre, vous pouvez cependant être dépressif·ve, plus angoissé·e…

Le fait d'être surdoué·e peut impliquer que votre histoire soit colorée d'une manière spécifique.

Il est peut-être utile de le savoir pour mieux en tenir compte.

 

Lorsque la douance n'a pas été identifiée dans l'enfance et les besoins plus particuliers de l'enfant surdoué que vous avez été ont été peu, voire non, pris en compte, cela peut engendrer des questionnements quant à son efficience, ses capacités, un sentiment d'errance dans sa vie, de décalage, au plan personnel, professionnel… Parfois, on a juste l'impression comme d'un caillou dans sa chaussure mais, aussi petit qu'il soit, il dérange.

(En soi, encore une fois, et contrairement à des (neuro)mythes tenaces, être surdoué·e ne prédispose pas au malheur. Il est raisonnable de penser que certains surdoués adultes traverseront leur existence de manière tout à fait satisfaisante en ignorant qu'ils sont à haut potentiel intellectuel, en ayant su répondre à leurs besoins et suivre leur désir. Se découvrir surdoué·e n'explique pas tout !)

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Se découvrir à haut potentiel à l'âge adulte et avoir été identifié·e dans l'enfance engendre souvent des situations de souffrance bien différentes.

 

Et quand bien même le bilan psychologique ne devait pas identifier une douance, ce en quoi vous vous êtes reconnus probablement au fil de vos lectures n’en est pas moins vrai pour vous et il est possible de travailler dessus.

 

Au-delà de ces considérations, il est courant que je reçoive dans ma pratique clinique des gens qui s’interrogent ainsi : « Et si je ne suis pas surdoué·e, je suis quoi ? »

Sachez qu’apprendre que l’on est surdoué·e n’est pas la réponse à toutes les questions et souffrances d’un sujet. L’identification d’un haut potentiel ne dispense pas d’un travail sur soi. Elle permet simplement de mieux pouvoir rassembler les pièces du puzzle.

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Enfin, il n'y a pas de thérapie spécifique aux personnes à haut potentiel. En revanche, prendre en compte la douance peut être plus que nécessaire afin de mieux accueillir, entendre et aider la personne dans son cheminement.

(1) S. Brasseur et C. Cuche, Le haut potentiel en questions, éd. Mardaga, octobre 2017, p. 21

(2) Ibid., p. 46

(3) Ibid., p. 27

(4) Ibid., p. 16

(5) N. Gauvrit, Les surdoués ordinaires, éd. PUF, 2015, p. 161-175

(6) S. Brasseur et C. Cuche, ibid., p. 16

(7) Quant à ce qu’il en est d’une définition de l’intelligence, je vous renvoie aux pères de la psychologie et à tous ceux qui ont développé : Spearman, Binet, Gardner, Caroll… Les livres de J. Grégoire proposent notamment une partie dédiée à une tentative de définition de ce qu’est, du point de vue de la psychologie, l’intelligence.

(8) N. Gauvrit, ibid., p. 50

(9) Ibid., p. 54

(10) Ibid., p. 52

(11) Ibid.

(12) Ibid., p. 55-56

(13) Ibid., p. 57

(14) S. Brasseur et C. Cuche, ibid., p. 91

Bibliographie
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Librairie Vintage
  • Todd Lubbart, Les enfants exceptionnels, éditions Bréal, 2006

  • Charlotte Parzyjagla, Les adultes surdoués, 100 questions / réponses, éd. Ellipses, 2018

  • Jean-Jacques Terrassier, Les enfants surdoués ou la précocité embarrassante, esf éditeur, 1981, 9ème édition en 2009

  • Gabriel Walh, Les adultes surdoués, coll. Que sais-je ?, 2017

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